Enfermée
Initialement posté sur 1.5 en avril 2010
Je suis née pour vous rendre fiers, et des tréfonds de ma déchéance j'arrive encore à vous dominer. Pathétique.
Enorgueillissez-vous, enfin, d'avoir l'immense pouvoir de vous auto-satisfaire. Ah ! Je ris et je vous écris, vous succombez et cela m'enchante. Ah ! Maudis soyez-vous, immondes hyperboles aux aveux factices. Je vous exècre de mots, je vous noie dans l'amer. Apprenez, mes amis, que la vie n'est belle que quand elle me plaît.
Je veux vous détruire de la pointe de ma rancoeur qui aujourd'hui se déploie insidieusement.
Je coule. Mon ire ne suffit plus à effacer mes tourments. Je ne suis rien. Ni personne. Je ne suis pas. Je suis un jeu, tourné en dérision, massacré par la seule force de ses dés. Je suis truquée, trouée, effacée. Je suis absente, cherchez à 'abonnés', il paraît que j'en faisais partie avant mais que désormais j'ai oublié jusqu'à ma propre existence. Mes maux. Ah ! Ah. Mes. Mots.
Oui mais vous trichez, tous autant que vous êtes, à me regarder d'aussi loin sur vos balcons de cristal. Vous me faites rire à ainsi me lapider, éclaboussés par mes sens. Hués par ma pitié. Je vous abhorre, tous autant que vous êtes, dans vos parures d'or et vos atours de bohème. Je vous regarde, laissez-moi rire, synonymes absents de volontés dissimulées. Vous n'êtes qu'envie et déraison. Comme s'il vous suffisait d'être pour pouvoir respirer, engoncés que vous êtes dans votre vanité.
Je vous déteste.
Allez crever.
10:31 - 8 nov. 2015
Je le trouve chantant de colère, c'est toujours un bon texte à ce jour. Les phrases sonnent justes et sincères dans leur succession.
Je changerais peut-être juste celle-ci qui fait tâche dans l'enchaînement :
A toi de voir. Tout le reste est impeccable. Le titre m'intrigue parce que je le trouve curieusement en marge par rapport au contenu, mais ça m'arrive souvent aussi :)
14:42 - 8 nov. 2015
La pointe fait penser à l'épée. Se déployer fait penser à un oiseau. La métaphore me pose un problème de sens. Pourquoi ne pas usiter du mot "percer" ou d'un synonyme plus proche. A l'inverse si tu veux garder "déployer" mettre un élément de vocabulaire proche des ailes, ou des oiseaux. Dans une comparaison, ou dans l'usage des mots, il faut garder une certaine unité. Personnellement, je note plusieurs petites approximations comme celle-ci.
Ce paragraphe là est très intéressant. Par contre je me suis posé la question quasi immédiatement. Pourquoi le "Je coule". Couler me fait penser et m'évoque une rivière, un océan, des larmes. Des larmes oui. Quelque chose qui ruissèlent. Une métaphore supplémentaire devrait faire le liant entre ce "je coule" et "mon ire". Je pinaille peut être mais c'est ce qui fait, je pense, la différence entre une bonne écriture et une écriture excellente.
L'usage du vocabulaire du jeu est bon. Je n'ai rien à dire sur ce paragraphe, il est bien structuré.
L'apparition du mot cristal me paraît de trop à moins d'y apposer une logorrhée complémentaire sur le sujet. Il épouse certes le nom "or" par la suite mais je ne sais pas. Cette loghorrée colérique (pour me répéter) doit appuyer sur le mot comme tu le veux. Il faut au mot, lui apposer un sens et croiser ce sens avec le même type de vocabulaire et de mot. L'objectif est de donner, je suppose, un océan verbal de haine. Il faut donc user des astuces linguistiques qui permettent de l'évoquer en plus du vocabulaire. Je ne sais pas si tu comprends mon ressenti. Il faut "vomir" les mots en n'hésitant pas à faire revenir certains noms ou synonymes de manière permanente pour assaillir le lecteur. Il faut que chaque phrase soit lié sémantiquement parlant ou complètement opposer (comme dans l'expression d'une colère sourde qui change d'avis).
Il y aurait plein de petits usages de mots à revoir pour les étoffer ou les assainir. Pourquoi ? Parce que certains se marient très mal entre eux. J'ai cité un exemple au tout début. Mais je pourrais rajouter ceux là :
Mais globalement, restons positif, ce texte est très bien écrit. Il mériterait je pense une petite relecture pour affiner en fonction du sens.
Amen.
18:27 - 8 nov. 2015
Merci à tous les deux ! J'ai écrit ce texte en 2010, d'une traite ou presque (avec mon thésaurus pas loin, quand même), et je ne suis pas certaine que je pourrais le reprendre, tout simplement parce que ça fait 5 ans et que j'ai essayé, en vain, d'écrire à nouveau comme ça depuis.
Il a ses faiblesses, bien évidemment. Plumo à l'époque avait relevé une absence de fond, ce qui est vrai. Ce texte avait pour but d'être musical, et de cracher ma haine sur des sentiments que je n'éprouve plus aujourd'hui. Malgré tout, je tenais quand même à le rapporter d'1.5 à ici, parce que c'est celui que je préfère.
Encore merci pour vos remarques et vos corrections, extrêmement justes. Je les prendrai en compte pour de prochaines productions !
19:25 - 8 nov. 2015
22:34 - 8 nov. 2015
Je suis contente que chacun puisse y voir quelque chose Tr0n, tu me fais vraiment plaisir en disant ça :) On m'avait beaucoup reproché d'être hermétique, donc c'est déjà une victoire.
23:52 - 8 nov. 2015
Ce spectacle, http://www.opera-bordeaux.com/detail-spectacle/danse-2/pneuma-946/15-16-12.html, rythmé par Caroline Carlson, m'a tué le cerveau. J'ai cherché des dizaines de minutes à interpréter, à m'accorcher au mouvement. Et j'ai finalement compris, j'ai lâché prise et j'ai regardé. J'ai ressenti et j'en ai presque pleuré.
Tout cela pour dire simplement, parfois, ce qui peut paraître hermétique est simplement lu selon un cerveau géométrique qui hiérarchise et classifie le sens. Bien évidemment c'est fait avec plus ou moins de réussite, mais peu importe. Le langage est une symphonie de l'émotion; et malgré les codifications, on trouve toujours du sens à des mots, des gestes et des sons. Ceux qui prétendent le contraire s'oublie juste bien souvent. Et le mieux dans tout ceci, c'est que le sens qu'un auteur semble vouloir donner, n'est que rarement celui que le lecteur/récepteur ressentira ou imaginera. C'est là tout l'art du cerveau. Il existe des techniques, une foule de techniques pour faire ressentir, mais il existe aussi bien des façons sensibles différentes de transmettre une émotion.
Tu peux écrire bleu dix fois, si mon cerveau pense à rouge et qu'un mot m'a évoqué le rouge, et bien je verrais du rouge sur ton bleu.