Rouge.

J'ai vu Rouge sur les bords de l'Escaut
Qui trempait ses pieds nus entre deux eaux
Un soir de printemps, une nuit d'été
Je l'ai vue Rouge, qui trempait les pieds
Elle tenait un livre, un livre ou peut-être
Etait-ce un grand bouquet de fleurs champêtres
A l'ombre d'un pont sur un bateau ivre
Je l'ai vue Rouge, qui lisait un livre
Le flot s'écoulait, au bas de l'écluse
Répandant comme une brume diffuse
Elle m'attendait, écarlate et timide
Je l'ai vue Rouge, les genoux humides
Ses cheveux mouillés collaient à son dos
Ses yeux reflétaient le bleu de l'Escaut
Qui coulait le long de sa robe à pois
Je l'ai vue Rouge, nageant jusqu'à moi

Les rayons ambrés du soleil couchant
Séchaient la moiteur de ses vêtements
Posés sur l'herbe du bord du canal
Nue pourtant Rouge, belle et vespérale
Les ponts s'étaient levés, au garde-à-vous
Une péniche faisait des remous
En passant sur le fleuve qui serpente
Nue pourtant Rouge, si indifférente
Le temps avait passé jusqu'à la nuit
Passés les bateaux et les ponts-levis
Et si le vent tiédissait sur sa peau
Nue pourtant Rouge, ondulait avec l'eau
La ville se parait de ses lueurs
De ses cafés montait une rumeur
Allant marcher le long des quais
Nue pourtant Rouge, son corps frissonnait

***

Elle est partie flâner à quelques pas
Laissant ses sandales et sa robe à pois
Charmée par l’écho des voix enivrées
Pommettes Rouges, le cœur empourpré
Peu à peu, sa silhouette est devenue
Une forme incertaine, une inconnue
Passant à la clarté d’un réverbère
Pommettes Rouges, démarche légère
Puis son image s’est évanouie
Dans un recoin égaré de la nuit
Ne laissant qu’une pensée obsédante
Pommettes Rouges, et lèvres ardentes
Ne restait que sa robe et ses chaussures
La mélodie de sa voix qui susurre
Le souvenir de ses courbes dans l’eau
Pommettes Rouges, au bord de l’Escaut.