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[Rubrique] Courants d'air

Chez tonton Tr0n, les jets de mots

Tags : poesie
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12 nov. 2015 - 11:02

Bonjour à tous,

Je m'ouvre une petite rubrique de textes qui n'ont pas vocations à finir dans les bibliothèques mais à juste m'amuser sur les mots. Vous pouvez commenter, dire ce qui vous passez par la tête, peu importe, c'est ouvert à tout jet de mot. N'hésitez pas à nous en balancer, c'est toujours agréable de voir la réussite comme l'échec.


Courants d'air


Texte 1 : Médée.
Texte 2 : Un simple sourire.
Texte 3 : L'orchidée sauvage.
Texte 4 : Aphrodite.
Texte 5 : Haine.
Texte 6 : Un SMS.
Texte 7 : Britomartis.
Texte 8 : Comptine.


Tr0n, Dieu, ou Sainte Catherine (parce qu'elle est so cute).
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Message posté le 11:03 - 12 nov. 2015



Médée


L’élégante délicatesse du visage de l’angoisse; l’arcane ésotérique de la compréhension colérique. Autant d’énigmes et de mystères, de paradigmes amers, qui, par craintes, apportent pléthore de peurs et frayeurs. Ces figures mystiques troublantes, Glaucos, Scylla, autant que Médée en Colchide, insidieuses, n’expriment que la laideur de notre âme. Dans la volonté de transcendance, dans la recherche du bonheur, irascibles avilis que nous sommes, le nœud fétide de la domination d’Autre réveille le sceau de notre apocalypse consciente. Oui, Autre, l’empoisonneur de l’ego, qui de ses fragrances nauséabondes flétrit notre expérience et nos sens. Il montre, médit d'une sombre voix, il ternit le choix, il trace le dégoût et nous mène vers le cratère de la tristesse. C’est toujours avec effroi que le courtois sournois vous instille son venin. Il domine de sa calomnie, il couve votre mélancolie. Répugnant, de sa suave bave il offre le chagrin, et sans aucun choix, vous saisissez sa pale d’éventail. Il vous mène là. Autre est né pour exiger, enjoindre et commander. Qu’importe la méthode, force, soumission, pitié, beauté, vous sauterez de la falaise, berné par tant de fadaises. Alors écoutez Moi, cette ode, et crachez sur ces senteurs écœurantes.


Tr0n, Dieu, ou Sainte Catherine (parce qu'elle est so cute).
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Message posté le 11:10 - 12 nov. 2015



Un simple sourire


L’espoir du cœur suggère ses fantasmes monstrueux qui dérivent toujours en chimères quand la gracieuse désillusion de l’échec cède à l’amertume. Hurle le désir de ces vaines perceptions travestis par l’imaginaire, puis crient ces patibulaires déconvenues et revers. La convoitise d’une femme révèle toujours mes secrets et mes rêves les plus pervers. Je veux. Je veux posséder, disposer à loisir, séduire et jouer comme un enfant gâté. J’ai faim. Mon appétit exulte et je dévore son corps dans mes songes. Les mots de l’ogre sont impuissants, aussi chétifs et malingres que ceux d’un fluet maigrichon. Ils ne servent qu’à retranscrire avec faiblesse cette soif d’une manière primitive et archaïque. C’est de la boulimie de tendresse, de la gourmandise de caresses, la gastronomie de l’ivresse, l’indélicatesse de la jouissance. Comme un goinfre je l’avale et la croque avec voracité. Aucune place pour les friandises, pas de mignardises, juste la faim : élémentaire. Les métaphores, les métonymies et autres synecdoques… Non rien n’exprime avec exactitude ou perfection ces sensations à la fois douces et affreuses ; jouer le géant équilibriste, le colosse funambule… Ce sinistre plaisir angoissant. Du désoeuvrement à l'enivrement. L’ébriété d’un frôlement : cette fable. L’enlacement.

Mais… Son, simple sourire.


Tr0n, Dieu, ou Sainte Catherine (parce qu'elle est so cute).
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Message posté le 11:18 - 12 nov. 2015



L'orchidée sauvage


A ma muse irréelle.

Au regard du profane, l’orpheline est plus gracieuse et brillante que la nitescence de la nacre. C’est ainsi. Appréhender la réalité du mythe, concevoir et pénétrer l’éternelle Vérité. C’est ainsi. Insondable, cette blanche candeur illumine mon œil impur, qui de sa prunelle souille l’éclat de cette fleur. Sous la lumière d’une bougie, mes sens, immondes et abjects révèlent l’imparfait, l’illusoire. Je ne vois pas, j’engendre. Je ne touche pas, je ressens. Je ne sens pas, j’invente. J’évoque et j’invoque, aveugle pragmatique, sa beauté sans équivoque : la crédule argentée, l’infantile ingénue. Elle est un phare dans mes rêves nourris par le dégoût. Je ne la scrute pas, je la contemple. Elle est ma chimère, mon ange, mon cœur. Saisir chaque parcelle de son existence amère. Tu me trompes, de cette espiègle virginité, carcan d’émotions du sens d’une vie. En ton giron, tout s’éclaire.

Mutine, l’esquisse s’éclisse.

Elle nous offre une brillante et soudaine clarté. De blanche, couleur chélidoine se dévoile. Le pistil nu brille carmin ; une subtile fresque gradient vermeil à grenat, éveille l’appétit de l’amblyope. La naissance d’une conscience, cette métaphore humaine imparfaite. La pureté immaculée expire. Mon rêve s’éteint. D’un modèle irréprochable je ne vois plus que couleurs, arc en ciel écœurant qui fascine mon entourage. A mon œil, elle devient terne, à mon œil, elle devient fade. Insipide, l’enfantement n’est qu’un mirage et que vois-je ? Une âpre et futile métamorphose de la Vie. Irrémédiablement, vivre et grandir sont les égéries de la laideur de l’imparfait.

A ma belle orchidée sauvage.


Tr0n, Dieu, ou Sainte Catherine (parce qu'elle est so cute).
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Message posté le 11:46 - 13 nov. 2015



Aphrodite


La prunelle d’airain. Biche aux yeux merveilleux, forme amende mignards et querelleurs. Le pur éclat d’un simple regard rusé. Juvénile et angélique, doux comme celui des agneaux, matois comme celui des chats. Ce visage… Mon Dieu, ce visage. L’effigie d’Aphrodite. Intangible et impalpable. Nul n’ose la toucher de peur de la briser.

Cette frimousse fabuleuse, suave et sucrée, la perfection d’un idéal. Elle se trémousse sur les tables de bar aux heures où les grands font la sieste. Elle rit à gorge déployée, offre des sourires en cadeau et danse en cadence, sur les rythmes des îles.

Elle a deux ans.

A la genèse de mon imaginaire.

Il a de la chance d’être papa.



Haine


Amour et amitié.
Baisers et bises.
Sourde pitié.
Ses lèvres frôlent ses pommettes. Il sursaute. Sa peau se plisse, sa peau se crispe, la chamade attrape son coeur. Sous les effluves de ce délicieux arôme, il tressaille. Il aime ce parfum. Des années durant il la chérit. Des années durant il l’a senti. Les années passant, il l’a haïe.


Tr0n, Dieu, ou Sainte Catherine (parce qu'elle est so cute).
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Message posté le 00:22 - 15 nov. 2015



Un SMS


Le silence assourdissant de tes sourires.

Il déchire ma quiétude,
Me laisse mourir.
Dans le trouble de tes rires
De ton attitude.
Brûlant et lentement...
Lentement...

Ton corps avare de paroles, charmant.
De ces gestes affriolants, il devise.
Du bruissement d’un bras,
Des chuchotements de ta voix
Comme une mélopée,
Une complainte qui vous crève
Chantée par tes lèvres
Ton regard pétille,
Et de ta ravissante pupille,
S’élance pour me dévorer.

Tes seins invitent à la convoitise.
Et ainsi naît l’appétant désir,
De te voler un baiser.

D’une simple posture,
Tu joues des braises qui m’attisent
Et aucun augure pour te dire,

D’un murmure
Que tu es la plus gracieuse,
Et la plus précieuse


Tr0n, Dieu, ou Sainte Catherine (parce qu'elle est so cute).
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Message posté le 00:50 - 15 nov. 2015

Tr0n, je me dois d'avouer que la lecture de tes jets de mots a eu raison de mes à-priori sur ton personnage. En effet je ne porte pas en odeur de sainteté les gens qui parlent trop bien (ce que l'on appellera le réflexe de l'idiot). Mais ... voila j'ai fait le pas et j'ai lu, étrangement la musique des mots se développe et le registre soutenu dévoile la complexité des accords. Tu écris de la musique, j'adore, j'entends tes phrases. Ces pavés à l'allure logorrhéique sont en réalité des pierres taillées avec minutie par un véritable artisan, qui se mettent à briller quand on les regarde avec attention.

Bien que je garde cet œil quasi philistin, dû à mon manque de savoir en la matière, je lis avec plaisir ce que tu écris, merci de partager tes divagations littéraires.


Ma petite galerie graphique
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Message posté le 11:28 - 16 nov. 2015

Zut, je suis un "personnage". Il ne faut pas sombrer dans la naïveté de croire que j'écris de manière soutenu. Je suis un adorateur de l'argot et du langage familier. Je ne fais que chercher des mots, tourner autour d'eux. Parfois j'arrive à trouver une correspondance parfaite entre ma sensation et la sémantique du vocabulaire. Souvent je rate aussi. Heureusement d'ailleurs. Je fais rarement des jets de mots comme ceux là. Ils sont émotionnellement très coûteux car ils naissent toujours d'une sensation personnelle. Sans sombrer dans le pathos, j'essaie justement de les tourner comme une musique plutôt que comme du sens. C'est exactement ça. J'essaie de m'amuser et de sortir cette fameuse mosaïque de tripes (une expression qui m'a toujours marqué).

Merci en tout cas, ça fait toujours plaisir. Mais je suis persuadé que tout le monde, peut, avec du travail, pratiquer ce genre de sonorité et de rythme, de jeux. Il suffit juste de se poser derrière une feuille blanche et de tourner autour des mots. J'aimerais d'ailleurs que d'autres participent car je suis sûr que beaucoup y arriveraient avec brio.


Tr0n, Dieu, ou Sainte Catherine (parce qu'elle est so cute).
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Message posté le 12:20 - 16 nov. 2015

Le mot personnage n'est peut être pas très sympathique en effet, j'en suis désolé. Je voulais dire par là que sur un forum on se fait une idée des personnalités d'après ce qu'elles écrivent, et pas plus. Tout l'aspect émotionnel et complexe de la réalité est tronqué par le médium, en ce sens on y voit des personnages, des avatars, dont l'apparence ici n'est pas la même certainement que dans la réalité. Oui du coup j'ai pu avoir la naïveté de croire que tu écrivais en soutenu, pour le "genre" ou juste la démarcation, mais encore une fois la bêtise des préjugés ...

En tous cas tu donnes envie de jouer avec les mots, du moins d'apprendre à le faire.


Ma petite galerie graphique
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Message posté le 14:21 - 17 nov. 2015



Britomartis

A,
La déesse du Mont Dicté,
La première fille de Carmé,
La douce et sucrée,
Britomartis.



Phénicie.
Dans la citadelle d’Argos et ses danaïdes,
Elle aimait à se baigner comme les naïades,
Ou cueillir des fleurs près des matia.

La farouche, à la chevelure de cuivre,
Bronze aux reflets d’airain, danse, ondule avec souplesse
Ses reins divins d’une exquise délicatesse.
Le beau la flatte.
Mais solitaire rien ne l’attise.
Alors, agacée, elle s’éloigne à la hâte.

En Crêtes,
Si gracieuse, elle arrive.
Minos courtise la belle, avec concupiscence,
Et convoitise.
Le rapace la désire avec appétence
Et Neuf mois durant, il achoppe ; effrayée, elle s’échappe.

Le calvaire n’osa pas la suivre
Quand elle se précipita du haut de la falaise
Pour échapper à tous ces aléas et fadaises.

A Egine.
Si séduisante, elle arriva.
D’un amour charnel, le pêcheur qui la sauva
Des longs filets,
S’éprit d’elle et encore troublée, elle s’éloigna,
Mortifiée par tant d’ardeur, à désirer son cœur.

Sur l’Olympe.
Si charmante, elle arriva.
Terme de son épopée, elle soupira, tourmentée
Par ces mélopées.
Désormais favorite d’Artémis, Gorgone adulée,
Elle préservera sa virginité, pour l’éternité.


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Message posté le 14:24 - 17 nov. 2015



Comptine


L’ondine des auvents
Dans l’esquif du printemps.
C’est le début d’une comptine
Exclusive pour les glands.

Qui s’y frotte s’y pique !
Qui s’y frotte la nique !
Qui s’y frotte… Cynique…

Mélusine au gréant
Prend un spif et s’éprend
D’une bulle de résine.
Evasive, elle s’étend.

Qui s’y frotte s’y pique !
Qui s’y frotte la nique !
Qui s’y frotte… Cynique…

Mélusine la maman,
Du castel d’if allant,
Ou plutôt quittant l’usine
Lascive s’entiche d’un géant.

Qui s’y frotte s’y pique !
Qui s’y frotte la nique !
Qui s’y frotte… Cynique…

Mélusine chantant,
A Ténériffe vivant
S’enfuit à Messine
Et lessive son jeune amant

Qui s’y frotte s’y pique !
Qui s’y frotte la nique !
Qui s’y frotte… Cynique…

Mélusine est stupide.
Pères se valent,
Et perdu, turpide
Elle erre dans les halles…

Pauvre enfant sans parents
Qui d’un air amusant,
Aimera sa maman.

Pauvre adolescent sans parents,
Qui d’un coup de rein,
Reprendra un jour ce refrain.

Celui de maman.

Qui s’y frotte s’y pique !
Qui s’y frotte la nique !
Qui s’y frotte… Cynique…


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Message posté le 14:29 - 17 nov. 2015



Numa Pompilius


A la fontaine
Près de la porte Capène
Dans le vallon de Caffarella,
Souvent il alla.

S’enfonçant dans les bois
Un jour il croisa
La plus belle des muses.
Sans aucune ruse
Elle l’inspira,
Non de sa beauté
Mais de ses idées.

C’est ce qu’il raconta
A tout l’état,
Et il en profita
Alors, pour manipuler
Toute une assemblée.

Depuis ce temps
Quelle est la Vérité ?
Déesse des amants,
Les romains furent floués.

Ils l’adulèrent,
Et l’appelèrent
La muse Egérie,
Des intellectuels épris.


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Message posté le 14:55 - 17 nov. 2015

Comme tu vois, ces trois derniers textes sont quand même sacrément mauvais. C'était à une époque où je commençais à peine à jouer avec les mots. Comme je suis fan de la période Antique dans sa globalité, j'avais choisi des poésies dans ce style. Je me suis rendu compte plus tard, que ce n'était pas les rimes qui m'intéressaient mais bien les mots et leur sonorité interne. La rime, même riche, est un élément que je considère musicalement restreint et pauvre. D'où d'ailleurs, un profond désamour pour de nombreuses poésies classiques. J'étais très intéressé par la poésie latine, grâce à l'accent tonique qui m'a toujours fasciné. Un manque cruel dans notre langue d'ailleurs.

D'où mon amour pour Beaudelaire, et surtout Aloysius Bertrand. J'ai même été interrogé au bac de français sur "Ondine", l'un de mes poèmes favoris (c'est sans doute l'un des jours de ma vie de lycéen les plus importants. Je suis passé à 11 h 30, j'étais le dernier de la journée. Nous avons parlé de la prose poétique jusqu'à 14 h 30 avec la prof de français qui m'avait interrogé. Non sur de la culture d'auteur, mais sur le sensible du jeu des mots. C'est, je pense, le tournant de ma vie; avec évidemment ma prof de français pendant ces années là qui était un fantasme ^^). Rimbaud ensuite. Ca, ça, c'était de l'art et non pas uniquement de la technique. Du romantisme, de l'esthétisme, de la beauté sensible à l'état pur. Oscar Wilde, typique de la prose poétique. Bref.


Tr0n, Dieu, ou Sainte Catherine (parce qu'elle est so cute).
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