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La trente-huitième elfe

"Récit du 38" datant du 20/12/2010

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7 nov. 2015 - 22:53




« Il est l’heure… Il est l’heure… »

La voix lointaine mais puissante d’Emeldiz résonnait dans la forêt de Galdor. Les trente sept elfes au physique frôlant la perfection entendaient l’appel de la prêtresse du plus profond de leur être. L’esprit de celle qui fut la première femme du clan de Galdor se réveillait chaque soir de pleine lune, prêt à réunir ses descendantes pour la cérémonie mensuelle. Comme attirées par la voix de leur aïeule, les jeunes elfes de la lune couraient à travers bois, évitant furtivement les pièges et les défis que le côté obscur de la nature leur lançait. 23h. Elles avaient une heure pour surmonter les épreuves qui leurs étaient imposées, une heure pour rejoindre l’arbre qui les avait mises au monde, une heure pour arriver à temps face à la pierre mystérieuse que toutes protégeaient. Leur ancêtre les guidait, sa voix les poussait à la rejoindre au centre de la forêt. Un cercle de trente sept arbres le délimitait, créant ainsi un espace qui dévoilait une pierre majestueuse aux reflets violets et brumeux sous le rayonnement de la lune.
Il en avait toujours été ainsi. Chaque gigantesque séquoia dont la cime s’élevait jusqu’aux étoiles engendrait une merveilleuse petite créature aux oreilles allongées et à la longue chevelure de jais tombant en cascade sur une peau violacée. Une minuscule luciole apparaissait alors, voletant au-dessus de la dernière née en lui apportant un éclat de lumière. Cette dernière s’agitait autour de l’elfe et dans un halo magique, elle gravait sur son visage un tatouage représentatif du nom qu’elle lui choisirait ensuite, le prononçant timidement de sa voix cristalline. Il existait une elfe par arbre. Lorsque la mort emportait l’une d’entre elles, le grand séquoia qui venait de perdre son enfant créait une nouvelle elfe lunaire. Ainsi la tribu de Galdor était constamment composée de trente sept elfes. Il y avait également trente sept lucioles mais ces petites fées de lumière étaient immortelles. Elles avaient vu défiler plusieurs générations d’elfes depuis la naissance d’Emeldiz. Chacune s’occupait d’un séquoia et donc de la jeune fille qui lui correspondait. Un simple contact avec un corps elfique de leur part pouvait guérir de profondes blessures. Leur unique but était de protéger le peuple de Galdor afin qu’il puisse remplir sa mission : préserver l’Harmonie et vénérer la lune tous les soirs de plénitude afin d’honorer la nature pour qu’elle puisse continuer à leur offrir ses bienfaits. La pierre centrale étendait son aura à travers la forêt toute entière grâce au pouvoir de la mélopée chantée par Emeldiz, accompagnée de ses descendantes. Sa force résidait dans le fait qu’elle renfermait les âmes des ancêtres de la tribu, conservant l’esprit de celles qui avait quitté le monde des vivants depuis d’innombrables années. De ce fait, un contact physique avec cette pierre colossale permettait aux générations actuelles de communiquer avec leurs prédécesseurs.

Glingal, l’une des jeunes elfes de la lune s’élançait agilement au cœur de la forêt, talonnée par la luciole qui la suivait depuis sa naissance. La première règle à suivre dans son clan interdisait formellement les liens affectifs entre elfes et lucioles. Ceci afin d’éviter des problèmes d’ordre sentimental qui risqueraient de porter préjudice à l’Harmonie et qui mettrait en péril le cycle, à la mort de la jolie elfe. Pourtant Glingal et Tiny avaient noué secrètement une relation forte qui dépassait la loi en vigueur. Un seul regard suffisait pour qu’elles se comprennent et tout se passait toujours très bien. Malheureusement ce jour-là il leur était extrêmement difficile d’atteindre l’arbre géniteur de Glingal, cette dernière éprise d’une fatigue insurmontable.

- Allez, encore un effort ma belle ! Tu vas y arriver, nous ne sommes plus très loin maintenant ! lui murmura amicalement Tiny.
- Je… suis… à… bout… articula difficilement Glingal.

Le vent fouettait violemment son visage angélique. Les branches s’entre mêlaient dans ses cheveux fins et le sol se faisait de plus en plus lourd sous ses pieds, comme s’il cherchait à l’ensevelir.

« Il est l’heure… Il est l’heure… »

La voix d’Emeldiz se faisait de plus en plus angoissante dans le cœur de Glingal qui sentait son corps refuser de poursuivre. Son souffle s’accélérait dangereusement, ses jambes ne la tenaient presque plus et la sueur coulait lentement de son front comme si le temps avait ralenti sa course ainsi que celle de la jeune fille. Tiny développait un maximum d’énergie pour panser les blessures de sa protégée mais dès qu’elle en soignait une, plusieurs autres apparaissaient. C’était un combat sans fin. Glingal, épuisée, ne lâchait pas prise et s’accrochait aux pensées réconfortantes du souvenir de son peuple bien aimé. Les elfes de la lune étaient liées mentalement et plus elle se rapprochait de sa destination, plus elle pouvait percevoir leur présence. Elle entrevoyait également leur inquiétude, en écho à celle de la petite luciole à ses côtés. Puis s’en fut trop. Une seconde de divagation suffit à Glingal pour laisser la nature reprendre le dessus. Dans un élan mal contrôlé, sa jambe gauche ripa contre une racine qui s’enroula aussitôt autour d’elle, jusqu’à ce que son corps s’effondre tout entier sur le sol. Le bruit sourd de sa chute perturba le calme environnant et la scène parut se figer un instant. Seule la plante maléfique s’agitait lentement, étouffant vicieusement le corps déjà violacé de l’elfe. A présent inconsciente, Glingal ne pouvait plus se défendre contre cette attaque et la pauvre Tiny gesticulait d’effroi devant le spectacle tragique auquel elle assistait impuissante. Dans une agitation incontrôlable, elle tenta de sauver son amie en vain. Ne sachant plus comment agir de manière efficace, elle se posa fébrilement sur la joue de Glingal. Des petits hoquets de tristesse raisonnaient, suppliants, comme si quelqu’un venait de secouer une clochette brisée. La petite luciole sanglotait, laissant couler des grains de poussière dorés en guise de larmes.

L’immense arbre mère avait commencé son travail de régénération. Une étrange lueur se développait dans un mouvement rotatif autour du tronc. En quelques minutes, un fœtus avait pris place au seuil du séquoia, grandissant à une vitesse qui dépassait les lois de la nature. Une nouvelle descendante de Galdor prenait place au creux du résinifère, sous les yeux ébahis et attristés des autres filles. Si une jeune elfe naissait, cela signifiait forcément que Glingal les avait quittées. Les yeux à la fois remplis de larmes et d’émerveillement, les elfes de lune se préparaient à accueillir dignement leur nouvelle petite sœur.
Toutes échangèrent un regard intrigué malgré leur distance et la pénombre dans laquelle elles étaient plongées. Partagées entre la peur et la tristesse, entre la haine et l’amour, entre le respect et la rage, c’était finalement le silence et l’attente qui l’emportaient. Puis la petite créature s’éveilla, laissant apparaître le visage d’une adorable fillette au sourire amical. A cet instant précis toutes les lucioles se dirigèrent vers cette nouvelle venue. On aurait dit qu’une force invisible les attirait inévitablement vers cet enfant de la lune. Les esprits de la tribu enfermés dans la pierre sacrée palpitaient d’impatience, il ne manquait plus que Tiny pour effectuer le rituel d’accueil qui était réservé à la cadette.

Glingal était toujours inerte, allongée sur un lit végétal. La petite luciole ressentait à peine l’appel du séquoia et son corps tremblotant luttait contre cette attraction pourtant inévitable. Petit à petit Tiny fut donc arrachée au visage de son amie, son corps attiré par la puissance magique des arbres.

- Glingal ! Glingal ! Reviens, je t’en supplie ! Ne me laisse pas…

Son cri de désespoir se fondit en une tristesse inexprimable. C’est alors que les microscopiques grains de lumière qui reposaient sur les joues froides de l’elfe commencèrent à s’illuminer. Leur volume tripla jusqu’à exploser en un rai éblouissant qui jaillit au-dessus du corps inconscient. Tiny n’eut pas le temps de comprendre la situation qu’elle se retrouva en un éclair près de ses sœurs toutes réunies autour d’une jeune elfe qui lui était inconnue. Son esprit se détacha de ce qu’elle venait de vivre et elle se rendit compte que le cycle se poursuivait déjà. Une nouvelle enfant venait de remplacer Glingal et elle était maintenant chargée de procéder à la cérémonie qui la lierait à leur univers. La mort dans l’âme, elle rejoint le groupe afin d’observer de plus près l’elfe de lune en question. Cette dernière laissa entrevoir un regard inquiet, malgré son large sourire, à la vue de Tiny. La luciole éplorée commença alors son rituel, tournoyant machinalement autour de sa dernière protégée qui ne lui inspirait que la mort de sa chère Glingal. Appliquant une longue trace sous son œil gauche telle une larme en guise de tatouage, elle en entendait presque la voix d’Emeldiz qui lui faisait la morale.

« Règle n°1 : Ne jamais se lier d’amitié avec l’elfe que vous protégez. Je te l’avais bien dit ! »

Elle chassa immédiatement cette image de sa tête avant de se placer juste en face de l’enfant. Le moment crucial était arrivé. Tout le monde s’impatientait dans le silence le plus total, guettant la décision de la luciole qui devait à présent nommer la fillette. Tiny se concentrait tant bien que mal. Bizarrement elle ne réalisait pas la perte de son amie et son instinct refusait de la laisser penser qu’elle avait disparu à jamais. Le souvenir des petites larmes dorées gisant contre la peau violacée de Glingal inspira la fée lumineuse.

- Niniel, tu t’appelleras Niniel.

Le timbre aigu de sa voix scintillante révéla aux autres l’identité de leur dernière petite sœur.

- Souviens-toi de ton prénom, souviens-toi de qui tu es…

Ajouta Tiny juste avant qu’une vague d’étonnement gagne la foule. Sans prononcer un mot de plus, elle se retourna vers la source de cet éclat de surprise. Elle non plus n’en revenait pas, son cœur palpitait anormalement vite. Non loin du cercle des arbres géants se dessinait la silhouette de Glingal. Ses pas la conduisaient faiblement vers son peuple, mais elle était bien là, saine et sauve.

- Ne me refais jamais un coup pareil !!! s’exclama la luciole.

- C’est pourtant grâce à toi si je suis encore en vie, lui sourit-elle en retour.

Glingal cachait du mieux qu’elle pouvait la douleur qui perdurait suite à ses mésaventures. Elle s’adossa à son séquoia d’une main hésitante et se tint les côtes de l’autre. Essoufflée et gênée par tous les regards hallucinés rivés sur elle, Glingal poursuivit.

- Que se passe-t-il ? On dirait que vous avez vu un fantôme !

Puis son regard atterrit sur la fillette tout autant étonnée.

- Nous n’avons pas été présentées, qui es-tu ? Moi je suis Glingal, la fille de cet arbre.

- Je m’appelle Niniel, lui répondit sa sœur en observant simultanément le séquoia et son aînée. Je suis la fille de cet arbre… moi aussi.

Glingal écarquilla les yeux devant l’air fier de Niniel qui ne semblait pas réaliser l’absurdité de ses propos.

- Mais… c’est impossible… je ne suis pas morte ! s’esclaffa-t-elle.

Dans un regard d’incompréhension, Glingal chercha une réponse logique auprès de son clan. Malheureusement la tribu semblait tétanisée et plus personne ne bougeait. Même les esprits des anciens se faisaient oublier. Enfin la voix effacée d’Emeldiz brisa le silence devenu pesant.

« Techniquement tu as quitté le monde des vivants momentanément Glingal. »

- Mais…

« Les larmes de Tiny t’ont sauvé. »

- Alors le règlement à tort et…

« NON ! Vous avez désobéit toutes les deux ! Si la première règle proscrit ce genre de comportement, c’est qu’il y a une raison à cela ! »

Toute la tribu frissonnait d’effroi aux dires de la prêtresse. Elle n’évoquait jamais les lois de Galdor avec tant de précision. D’habitude chaque habitante se contentait de les appliquer aveuglément, sans poser aucune question. Consciente que l’autorité était en péril, Emeldiz reprit.

« Voyez ce qui est arrivé par votre faute ! L’équilibre est brisé à présent. Ne comprenez-vous donc pas que l’Harmonie vient d’être perturbé à vos dépends ? »

- Comment l’éveil d’une nouvelle sœur pourrait-il être un fardeau ? osa timidement une elfe.

« Comment ? Mais regarde les fondations du cycle : trente sept arbres, trente sept elfes et trente sept lucioles. Elle s’adressa ensuite à Niniel. Et toi ma pauvre enfant, tu es la trente-huitième elfe du clan de Galdor ! Ce n’est jamais arrivé avant mais aujourd’hui tu es parmi nous et ta vie sera parsemée d’épreuves… Ma fille bien-aimée, tu es obligée de partager Tiny et l’arbre mère avec Glingal. »

Niniel se réjouissait d’avance de pouvoir partager quelque chose avec quelqu’un. Mais le sourire qu’elle arborait s’estompa lorsque son aïeule continua de parler.

« Cela signifie que vos forces seront dédoublées. Vous devrez être toutes les deux là aux cérémonies de la pleine lune sinon vous mourrez. Et cela implique également un travail de protection décuplé pour toi, Tiny. »

Les trois individus concernés se raidirent suite à ces paroles pessimistes quant à l’avenir qui leur était prédit. Si la luciole devait surveiller les deux elfes, elle serait vite surmenée. Il y avait pire. Tiny devrait obligatoirement éduquer Niniel tout en restant présente pour Glingal. C’était du suicide. Leur réflexion les mena au bout de la nuit et alors que l’aube perçait, on n’entendit plus qu’un bref lointain murmure.

« Bonne chance »

Tous les esprits se terrèrent ensuite au plus profond de la pierre sacrée. Dès le petit matin, la trente-huitième elfe de lune entama son apprentissage. Tiny se chargea de lui enseigner tout ce qu’une fille de Galdor doit savoir. Tout d’abord il fallait lui inculquer les trois règles du clan :

1. Ne jamais se lier d’amitié avec une luciole, comme elle l’avait constaté auparavant.
2. Ne jamais dépasser les limites de la forêt, zone de protection de la pierre.
3. Toujours répondre à l’appel d’Emeldiz lors de la pleine lune.

Puis il était nécessaire de lui raconter l’histoire de son peuple. Niniel se montrait toujours très attentive mais le passé la laissait indifférente. Elle ne voyait pas l’intérêt de s’imposer ce rythme de vie pour soi-disant protéger la nature. Et enfin, sa luciole entreprit l’entraînement physique, le plus important pour survivre aux épreuves mensuelles et le plus intéressant selon Niniel qui était avide de réussir cette fois. Plusieurs capacités étaient au programme. La course à pied, le saut d’obstacles, le maniement du shuriken, etc. L’elfe de lune désirait au plus vite parfaire sa formation pour bénéficier de plus de liberté, ce qui lui permettrait d’explorer les environs comme bon lui semblerait.

Quelques semaines plus tard, Niniel avait considérablement progressé et elle était devenue une véritable guerrière. Sa force de caractère se manifestait également, surprenant toujours autant ses amies plus réservées et dociles. Quand Tiny s’absentait avec Glingal, la petite intrépide filait en douce au fin fond de la forêt. Armée d’un puissant shuriken, un cadeau de ses compagnes, Niniel ne craignait rien et les lois de son clan lui importaient peu. Pour elle il était impensable de rester sclérosé dans une société qui agissait selon le bon vouloir des anciens. Bien entendu elle respectait ses ancêtres, témoins de son appartenance à ce groupe avec lequel elle évoluait, mais elle ne pensait pas utile de se plier au fonctionnement des autres. C’est ainsi que la fillette aux airs farouches mit en danger involontairement toute la tribu. Le soir de la pleine lune suivante, les mauvais pressentiments d’Emeldiz se confirmèrent. Alors que sa voix réunissait chaque elfe à son géniteur comme d’ordinaire, Niniel se baladait tranquillement aux abords de la forêt, observant la beauté de la lune. A plusieurs reprises elle avait causé des ennuis à Glingal ces derniers temps car ses forces s’amenuisaient sans Tiny. Elle était bien consciente des risques qu’elle faisait prendre à sa sœur aînée, et c’est pour cette raison qu’elle ignorait le rassemblement ce soir-là.

- Non Emeldiz, il faut m’oublier et protéger Glingal. Je ne vous suis d’aucune utilité et je veux partir explorer le monde au-delà de la forêt de Galdor.

Convaincue par son choix personnel, Niniel marchait de plus en plus loin du cercle magique à travers la végétation envahissante.

Glingal, en femme courageuse ne se plaignait que très rarement. Maintenant habituée à partager sa luciole et son foyer avec une autre, elle avait accepté son sort malgré les contre-coups. En effet, la petite fée n’étant plus à ses côtés en permanence certaines cicatrices la tiraillaient sans cesse. Il en serait toujours ainsi. Niniel et Glingal étaient vouées à subir des défaillances physiques puisque leurs forces étaient divisées en deux. Son ascension la mena néanmoins jusqu’au séquoia qui l’avait enfantée. Ses sœurs se regroupaient également vers leur arbre respectif mais aucune nouvelle de la dernière née. Glingal avait un mauvais pressentiment, comme si un danger imminent allait surgir. Minuit. L’heure de la cérémonie avait sonné. Chacune débutait l’hymne à l’exception de Glingal qui se tordit subitement l’estomac.

- Tiny ! Fais quelque chose ! Va la chercher !

La luciole se précipita à travers les buissons dans l’unique but de ramener la trente-huitième elfe. La situation semblait se reproduire mais cette fois il fallait faire vite.

Niniel perçut le stress de Tiny et courut dans sa direction à son approche. Une douleur minime lui chatouillait le ventre mais elle aurait été incapable de justifier pourquoi.

- Tout le monde t’attends ! As-tu déjà oublié ta promesse ? Glingal pourrait payer très cher le prix de tes erreurs, l’avertit la luciole.

Après une courte réflexion, Niniel s’élança à la suite de Tiny en ressassant ses paroles. Une vie comme la sienne ne lui convenait pas. A cause de sa naissance tout avait été chamboulé ici bas. Une larme coula le long de sa joue suivant la trace d’un violet profond déjà gravée depuis longtemps à cet endroit précis. Sa décision était prise. Elle ne voulait plus que ses sœurs soient attristées, elle ne voulait plus voir les hématomes de Glingal, elle ne voulait plus être cette elfe de trop. La numéro trente huit. A la fin de son trajet, Niniel contourna le séquoia qu’elle devait rejoindre pour se diriger directement vers la pierre colossale. Avant de sceller son destin, elle s’exprima à haute voix.

- Je ne peux me résoudre à toutes vous faire souffrir indéfiniment, dit-elle en escaladant le rocher majestueux. Ma place parmi vous n’est pas légitime et je ne supporte plus de briser cet équilibre qu’on s’évertue toutes à préserver en dépit de nos efforts.

- Niniel, qu’est-ce que… l’interrompirent Glingal ainsi que Tiny, le regard meurtri.

- Je vous remercie particulièrement pour tout ce que vous avez fait pour moi.
Sur ces mots, elle s’allongea au sommet de la pierre magique et invoqua les esprits qu’elle contenait.

- J’implore votre grâce pour enfin rétablir le cycle ! Que votre sagesse et votre puissance pardonne mes erreurs et prennent mon âme ! Qu’elle puisse résider près de vous en respectant l’Harmonie du clan de Galdor.

La pierre frémit et dans un souffle violent l’esprit de Niniel fut arraché à son corps et prit place auprès des anciens, en laissant l’enveloppe charnelle de celle qui venait d’offrir son âme. Automatiquement Glingal recouvra sa force d’antan et d’un bond elle rejoignit le centre du cercle enchanté. La petite elfe avait fait preuve d’une grande bravoure et elle n’oublierait jamais à quel point la fillette rebelle s’était finalement montrée digne de son rang.

- Va jeune Niniel, va reposer en paix avec Emeldiz et les autres. Vole petite Niniel, vole au-dessus de nos existences insignifiantes. Tu voulais être libre, aujourd’hui te voilà encrée dans nos cœurs. En retour nous garderons toutes ton altruisme pour exemple et par nos vies tu pourras courir, chasser, prier, aimer et rêver.

Les trente sept elfes de la lune approuvèrent cette promesse d’espoir et la forêt put arborer ses plus belles couleurs, offrant à Niniel une sépulture à la hauteur de son sacrifice. Personne ne l’oublierait jamais. Personne.


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N.B : Emeldiz signifie "repos" en elfique, Glingal "la flamme suspendue", Niniel "la fille aux larmes", Galdor "étoile de l'espoir". Tiny vient de l'anglais (tout petit).


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Message posté le 12:00 - 12 nov. 2015

Citation de Melaka :
Elles avaient une heure pour surmonter les épreuves qui leurs étaient imposées, une heure pour rejoindre l’arbre qui les avait mis au monde, une heure pour arriver à temps face à la pierre mystérieuse que toutes protégeaient.
mises


La voix d’Emeldiz se faisait de plus en plus angoissante dans le cœur de Glingal qui sentait sont corps refuser de poursuivre.
son


Le bruit sourd de sa chute perturba le calme environnant et la scène paru se figer un instant.
parut


Si une jeune elfe naissait, cela signifiait forcément que Glingal les avait quitté.
quittées


Les yeux à la fois remplit de larmes et d’émerveillement, les elfes de lune se préparaient à accueillir dignement leur nouvelle petite sœur.
remplis


Leur volume tripla jusqu’à exploser en un rai éblouissant qui jailli au-dessus du corps inconscient.
jaillit


Son ascension la mena néanmoins jusqu’au séquoia qui l’avait enfanté.
efantée



Niniel perçut le stress de Tiny et coura dans sa direction à son approche.
courut

Une larme coula le long de sa joue suivant la trace d’un violet profond déjà gravé depuis longtemps à cet endroit précis.
gravée


Tu voulais être libre, aujourd’hui te voilà encrée dans nos cœurs.
ancrée comme une ancre de bateau, ou encrée comme peinte?



Je l'avais déjà lu. Le texte est intéressant même si je trouve qu'il mériterait des développements. Ne serait-ce que ce qui se passe dans la tête de Niniel la rebelle pour qu'elle pense à se sacrifier.

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Message posté le 16:08 - 16 nov. 2015

Je te remercie pour te corrections ! Je modifie le texte dans la foulée.

Pour la dernière correction, je voulais bien dire "encrée", même si les deux mots peuvent convenir à la situation.

Concernant le manque de détail, c'est vrai que la fin se précipite un peu. C'est un "vieux" récit mais je me souviens que le thème avait été donné avec un délai et c'est vrai que je ne l'ai pas retravaillé ensuite.


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Message posté le 11:54 - 19 nov. 2015

Un petit passage prolixe en étourderies orthographiques ^^

« Les larmes de Tiny t’ont sauvéE. »

- Alors le règlement à [a?] tort et…

« NON ! Vous avez désobéit [désobéi] toutes les deux ! Si la première règle proscrit ce genre de comportement, c’est qu’il y a une raison à cela ! »

Toute la tribu frissonnait d’effroi aux dires de la prêtresse. Elle n’évoquait jamais les lois de Galdor avec tant de précision. D’habitude chaque habitante se contentait de les appliquer aveuglément, sans poser aucune question. Consciente que l’autorité était en péril, Emeldiz reprit.

« Voyez ce qui est arrivé par votre faute ! L’équilibre est brisé à présent. Ne comprenez-vous donc pas que l’Harmonie vient d’être perturbéE à vos dépends [dépens] ? »


Bon, c'était sympathique à lire. l'ambiance et l'univers sont là. Par contre, je rejoins Grendelor : la fin est un peu précipitée. On le remarque d'autant plus que le reste de l'oeuvre est soigné. L'histoire est riche en descriptions, en explications et je salue ton imagination (ça fait beaucoup de mots en "ion" tout ça :p ).

Bientôt un troisième volet à cette saga ?


En train d'élever un griffon...
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