Petite fille du désert
Texte datant du 07/09/2011
De ses grands yeux ambre elle espère.
Seule. Loin de chez elle. Le sable brûlant lui lacère les chevilles, le vent étouffant lui fouette la peau et le soleil impertinent lui arrache quelques gouttes de sueur. Pourtant elle déambule dans cet univers sec où nul autre n’ose s’aventurer. Le regard rivé sur les nuages, des formes se dessinent dans son esprit et ses pupilles étincelantes lui racontent des histoires qu’elle seule peut déchiffrer. La vie est plus fraîche lorsqu’elle rêve ainsi, ses problèmes fondent sous la chaleur de l’astre violent, elle en oublierait presque l’air suffoquant qui étrangle sa gorge.
Petite fille du désert.
Une étrange rencontre la rend téméraire.
Plus si seule. Elle regarde au loin une forme qui se rapproche. Elle entrouvre les yeux et l’observe. Un fennec sauvage ose timidement s’aventurer dans sa solitude. Le face à face silencieux semble durer une éternité, il devient un rite quotidien qui unit deux regards profonds. Les pupilles vertes de la créature en prennent une teinte ambrée, autant que la fillette gagne des pigments de jade dans les siennes. Progressivement, sa main se rapproche de la chaude fourrure de l’animal. Malgré le danger, elle ne peut résister à glisser ses doigts dans sa toison soyeuse. Mais à peine le contact crée, l'appel de la liberté réveille ses instincts et le fennec déchire férocement les bras démunis de la fillette.
Petite fille du désert.
C’est le mal qui la préfère.
Partagée. Envie de retrouver son ami, peur d’affronter son rejet. Elle ne réalise pas les crocs sur sa peau, elle ne comprend pas le sang sur ses bras. Mais elle ne bouge pas, elle continue de penser qu’elle pourra l’apprivoiser et que sa patience aura raison de tout ce qui les sépare. Il ne vient plus. Elle attend. Elle attend si longtemps que le soleil goûte sa chair et vole l’air qu’elle respire. Elle tombe. Elle tombe contre le sable qui se nourrit de sa carcasse immobile. Plus d’éclats aux reflets d’ambre, les yeux de la fillette se sont éteints. Le fennec se penche au-dessus d’elle et la regarde. Impassible.
21:53 - 8 nov. 2015
Et bien c'est typiquement le genre de style d'écriture qui me plaît. Je n'ai rien à redire. Je trouve dommage que tu joues avec les sons [en] dans le premier paragraphe et que tu ne reprennes pas l'idée dans les deux suivants. Doumache ! Philosophiquement j'ai esquissé un sourire, pour raison personnelle. En tout cas c'est délicieux de simplicité. J'aime beaucoup.
21:57 - 8 nov. 2015
Le Petit Prince qui finit mal.
J'aime beaucoup aussi. La seule chose qui me dérange c'est "c'est le mal qui la préfère". Pourquoi le mal?
09:19 - 9 nov. 2015
Merci Grendy ! Pour répondre à ta question, le mot "mal" résumait bien la situation de la fillette pour qui le rêve se transforme en cauchemar. Elle passe de l'espoir (malgré un cadre déjà difficile) à une totale abdication.
09:29 - 9 nov. 2015
J'attendais ta réponse sur le sujet aussi. Le mot "mal" est souvent employé avec une connotation "morale"; le mal naît de la morale. Passer de l'espoir à la mort n'est peut être pas si mauvais en soi. C'est même plutôt très pragmatique et réaliste.
09:44 - 9 nov. 2015
Hum, je vois... Merci pour la piste de réflexion.
10:20 - 9 nov. 2015
Pour la forme, j'aime beaucoup le découpage avec leitmotiv (et les répétitions poétiques), les phrases très courtes.
Pour le fond... Bah j'aime bien le désert :) et la simplicité sans concessions de l'histoire racontée.
10:28 - 9 nov. 2015
Merci pour ton avis :)