Fondation de Bjorn : Expédition I

Xanthys descendit du bateau et admira le village portuaire. L'activité de ses compagnons de voyage semblait briser la vie régulière du port.

Le Soleil levant donnait à la forêt des reflets dorés qui se superposaient à la rouille saisonnière. Ces éclats métalliques évoquaient l'objet de la quête dans laquelle l'équipage s'était engagé et Xanthys se demanda s'ils ne finiraient pas tous dévorés par le dragon de pierre qui protège ces trésors.

Le voyage avait fini par faire céder ses réserves mais sa méfiance demeurait. Pourquoi une femme aussi puissante que de Bjorn avait entrepris une telle quête en personne? L'ennui était-il une motivation suffisante?

Xanthys souffla dans ses mains pour se réchauffer des rayons glacés du matin et descendit sur le quai et s'approcha calmement de Montague. Comme L'intendant était en pleine discussion, Xanthys s'arrêta discrètement à quelques pas et alluma sa pipe.

En usant de grandes quantités de bois et de charbon et en poussant les machines à leur maximum, le bateau avait pu remonter haut vers le Nord. Ils avaient quitté les champs sans fin qui cernaient La Grande Belle Thil pour remonter le Tumult et pénétrer dans les premiers contreforts avant d'entrer dans la chaîne des Impalpables. Les montagnes portaient bien leur nom. Les plus hauts sommets étaient auréolés de brumes claires et les cimes blanches semblaient sortir des nuages.
Le navire avait de plus en plus de mal à remonter le courant qui devenait chahuté. Certains passages étroits faisaient gronder les moteurs. Bientôt il dut accoster car la pente était trop escarpée pour poursuivre la route fluviale. Il leur fallait continuer à pied. Des chevaux porteurs les attendaient à l'escale devenue le terme de leur navigation.
Les plans donnés par Montague Greenberg spécifiaient que l'expédition devait emprunter le sentier qui longeait le plus gros des cours d'eau irriguant le fleuve. Dès la confluence avec la rivière, le Nareyrou circulait dans une ravine et Léopold Singrier prit le temps de rajuster les chargements d'outils et de matériaux explosifs qu'il avait acheté durant la petite semaine de préparation offerte par leur chef. Tout son matériel avait été acheté au frais de la Compagnie et Léopold se sentait heureux de travailler dans de telles conditions. Il ne savait pas très bien ce qu'il devait découvrir hormis de l'or, mais il avait de bons outils et espérait un travail de qualité.
L'aventure lui plaisait. Il prit son cheval sérieusement par la bride et s'engagea dans la ravine le sourire aux lèvres.

Haesobia se trouvait dans un traîneau, bien emmitouflé sous plusieurs grande peau épaisse destinées à la garder au chaud, mais elle sentait malgré tout le froid crisper ses muscles douloureusement. Ajouté à cela qu'elle avait l'estomac un peu en vrac des alcools maison de tout genre proposés la veille au soir par les villageois, la jeune femme était d'assez mauvaise humeur pour apprécier l'aube éclatant se levant sur les montagnes.

Cependant, sa contrariété s'effaça bien vite quand le traîneau tiré par plusieurs chien-loups prit de la vitesse. L'excitation du départ et le sensation grisante de ce mode de transport la réchauffèrent plus efficacement que toute couverture. Son humeur amélioré, elle prit enfin la peine d'admirer le magnifique paysage qu'ils traversaient.

Plusieurs convois de matériels avaient pris de l'avance sur leur départ afin d'installé divers campements à des points stratégiques. Leur première mission au camp serait de définir les pistes à suivre après avoir analysé les différentes données selon leurs champs de compétence. La véritable aventure débuterait réellement après cette première orientation mais Haesobia était déjà émerveillée de cette équipée.

Anthonin de son côté, était plus suspicieux. Il soupçonnait que l'émerveillement de son ami ne durerait pas face au climat austère et au confort qui deviendrait bien vite inexistant. Ce n'était pas un voyage d'agrément mais bel et bien un travail dangereux pour lequel il avait signé une décharge en cas de décès... se répéta-t-il pour la énième fois.